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L’art et les ressources numériques : réquisitoire de l’avocat du diable

Internet, quel progrès! quelle technologie! Ce nouveau média a envahit notre univers et toutes nos disciplines sont désormais alimentées par son incroyable source de données. Mais lorsque les ressources numériques deviennent une fin et non plus un moyen, de nouveaux problèmes se posent. Internet, est certes une évolution incontestable, mais est-ce toujours un progrès? Mon titre « l’avocat du diable » veut mettre en avant ce point de vue critique, et mettre en lumière ces cyber-défauts en rapport avec le monde des arts.

Bien entendu, on ne peut pas remettre en cause, l’aide précieuse qu’internet et les ressources numériques en général apporte à l’Art. Tout d’abord par sa grande diffusion, plus besoin d’aller sillonner tous les musées pour apprécier leurs collections, d’arpenter les bibliothèques pour rechercher des ouvrages ou obtenir toute sorte de documents et d’informations sur de nombreux sujets. Cette facilité d’accès, à la culture est en soi une évolution très positive et un point fort de l’informatique. Les ressources numériques permettent de regrouper et de recouper des informations, de les lier entre elles, formant ainsi des corpus exhaustifs pouvait être améliorés avec l’avancée du savoir. On peut également leur accorder le pouvoir de contenir un maximum d’information dans un minimum d’espace, comme ces nouvelles bibliothèques électroniques, ou ses galeries de musées virtuelles. Je ne peux donc pas dénigrer ses innovations qui participent à l’évolution de l’art dans toutes ces branches (comme l’explique Chloé dans son article sur l’archéologie). Tant qu’il s’agit là d’un moyen qui permet d’étendre ses connaissances et de nourrir la discipline.

En revanche elle ne peut selon moi pas devenir une fin, et ce sont ces dérives de l’informatique que je désire souligner.
La diffusion des tableaux, sculptures et oeuvres de toute sorte est, certes, une bonne chose mais elle ne doit pas empêcher ou remplacer le fait d’aller les voir physiquement. Ce vieil adage antique, reprit par Winckelmann au XVIIIème siècle « Viens et vois » ne doit pas être remplacé par « Clic et vois » ! Cette dématérialisation de l’oeuvre d’art que l’on ne prend plus la peine d’aller regarder de plus près contribue d’une part à la perte de son caractère unique, quasi sacré, et d’autre part son impact. Le Bleu de Klein aussi hypnotique soit-il ne vous fera aucun effet si vous n’êtes pas à ses pieds, si vous ne vous laissez pas envahir par cet intense océan de pigment (et non de pixels), tout comme le fait de ne pas pouvoir librement circuler autour d’une statue de la contempler sous chaque angle, d’en apprécier chaque courbe.

Et cela vaut également pour la littérature, car l’écriture est un art mais pas seulement un art de l’esprit, il détient une force dans l’objet qui l’incarne : le livre. Les nouvelles bibliothèques électroniques regroupent en quelques heures des livres que certains ont mis des années à amassées, avec une patience de collectionneur, ces immenses murs tapissés d’anciens recueils aujourd’hui conservé dans quelques ko. Plus qu’un amas de pages, le livre est aimé pour sa matérialité, sa couverture, ses feuillets que l’on tourne, que l’on corne, qui stimule nos sens au toucher de la reliure, à l’odeur du papier.

Le fait que nos Arts entretiennent des rapports contigus avec ce nouveau média peut être vu comme un avantage et une évolution positive mais l’on ne peut pas écarter les problèmes qui vont de pair avec cette innovation. Sans compter le risque de voir un jour toute cette base de donnée s’écrouler et ainsi mettre en péril notre patrimoine qui une fois dématérialiser serait perdu à jamais. Il est donc important selon moi d’user des ces ressources numériques avec parcimonie, d’en faire une aide, un plus au service de notre discipline mais pas au point qu’elle en devienne dépendante ni qu’elle sacrifie son caractère physique et unique. Il faut conserver un lien direct avec les Arts et aller les rencontrer plutôt que de se contenter d’un copier-coller.

LP

 

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